DÉFENSE DU SOUKARU KOOR : Am touyaaba te rataxal digènte

Dans toutes les sociétés, d’hier comme d’aujourd’hui, il y a des pratiques consacrées et non écrites qui consistent à se dire des choses qui encouragent, soulagent et rassurent. Il en est de même pour les choses qu’on s’offre dont la quantité et la valeur marchande importent moins que leur sens symbolique dans la culture du bon vivre ensemble : ces mots et objets opèrent comme des catalyseurs de la cohésion sociale (rataxal digènte).

En islam, ces bonnes paroles et ces cadeaux sont rangés dans le registre des relations interpersonnelles (mu ‘âmalât) et laissés à la créativité de chaque groupe ou communauté. Le principe qui leur est appliqué est énoncé par les usûliyûn (principologues) musulmans comme suit : « la règle de base dans les relations est la permission». Il en ressort que ces pratiques de don et de réciprocité sont acceptées tant qu’elles ne heurtent pas quelque chose de fondamental relativement au dogme du Tawhid et autres matières de la foi, au halal et aux vertus.

Ce préambule nous fait dire que la pratique de «joxe soukarou koor» est en phase avec les enseignements de l’islam en matière de mu ‘âmalât. D’autant plus que le hadith qui incite à offrir un iftar (ndogou) durant le mois de Ramadan en constitue une solide référence scripturaire. Mais cette pratique risque d’être dévoyée et perdre son statut de bonne œuvre (‘amaloun Sâlih) si elle est ne respecte pas certains critères dont les plus importants sont les suivants :

  • l’intention doit être d’obtenir l’agrément de Dieu à travers un acte recommandé par le prophète (SAWS);
  • cela doit être quelque qu’on peut manger ou boire ou l’équivalent argent qui permet de s’en procurer ;
  • ne pas croire que c’est un acte obligatoire ni accepter de se le faire imposer ;
  • donner selon ses moyens licitement acquis;
  • éviter tout propos ou acte ostentatoire ou de rivalité y afférent.

Au total, la pratique de soukarou koor est à perpétuer tout en la préservant de ce qui peut entacher sa valeur cultuelle.

Les risques d’ostentation, de rivalité etc., sont réels sans pour autant justifier son abandon car les mêmes risques se retrouvent dans toutes nos pratiques profanes soient-elles ou cultuelles.

Pour que le soukarou koor soit un don qui a statut de iftar, il faut que ce soit prêt à être mangé ou bu ou comme déjà dit ou l’équivalent en argent. Offrir des tissus, des bijoux ou autres ne tient pas lieu de iftar au sens strict du terme, ils ont caractère de cadeau (hadiyya).

L’avarice ce ne doit pas empêcher de donner du soukarou koor même si on pourrait cacher ce mauvais penchant par des arguties de toutes sortes.
Imam Makhtar Kanté

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